Alexia Ҩ Blueberry

« Parce que se battre, c'est trop marrant »

Je courrais. De plus en plus vite. Au bout d'un moment, je ne sentais presque plus le sol sous mes pieds, sûrement du à un regain de poussière de fée qui me faisait voler. J'adorais courir dans la forêt, sentir le vent sur mon visage et les bruits des animaux tout autour. Certains disaient qu'ils étaient dangereux, surtout mes copains indiens. Quels peureux, ceux-là ! Des fois, ils avaient même carrément la trouille de s'approcher du bateau du capitaine « M'sieur l'poisson pourri ». Moi non. Jamais. Comme Peter et les autres Enfants Perdus. On a jamais peur, surtout pas des pirates même s'ils commençaient à devenir de plus en plus agressifs ces derniers temps. Tout ça à cause d'une main coupé, non mais je vous jure ! Ils avait même mis la tête de Peter à prix, comme si quelqu'un, au pays imaginaire, allait s'en prendre à lui. De tout façon, il se ferra jamais prendre, il est bien trop malin pour ça.

Je m'arrêtai soudain. Une couleur vive venait d'attirer mon attention. Un beau bleu violet, un des plus beaux que j'ai jamais vu. Je m'approchai du buisson, dont les petites branches ployaient sous le poids des myrtilles. Ah, les myrtilles ! Je les adorai, littéralement. A tel point qu'elles m'avaient donné mon nom, Blueberry. Ne pouvant résister plus longtemps, j'en pris une grosse poignée et les avalais d'une bouchée. L'idée que ces baies pouvaient être autre chose que mes fruits préférés – des baies empoisonnées, par exemple – ne me traversa à aucun moment l'esprit. On est comme ça, nous, les Enfants Perdus : téméraire, fous, et à notre manière, complètement stupides. J'en pris encore une poignée et me hissais jusqu'en haut d'un arbre, en regrettant le fait de ne pas avoir de sac. Enfin au sommet, j'admirais le ciel, la forêt qui s'étendait et la mer au loin, qui scintillait comme milles petits diamants...

La mer ! Oh, c'est pas vrai ! J'avais complètement oublié Alexia et son entraînement. Je tombais de l'arbre plus que je ne descendait et m'écorchait la jambe au passage. Oh bon, ce ne sera qu'une cicatrice de plus. J'en avais déjà tellement que je n'y faisais plus attention, à présent. A peine mes pieds touchaient l'herbe tendre que je m'élançais déjà à travers les bois. Une vingtaine de minutes plus tard, j'arrivais sur la plage, à petites foulées. Alexia n'était pas encore là. Tant mieux, je pouvais préparer le cours tranquillement. J'avançais de quelques pas et pris les deux épées en bois que j'avais soigneusement rangé - ou bien caché, ce qui revenait au même – entre un gros rocher et une dune de sable. Puis, je m'assis sur le sable et attendis mon élève qui devait arriver d'une minute à l'autre.